La Guinée est à nouveau suspendue à une décision judiciaire dont l’issue pourrait avoir de fortes répercussions sur la vie politique nationale. Ce jeudi 28 août 2025, la Chambre administrative et constitutionnelle de la Cour suprême devait statuer sur le litige opposant l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) au ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation (MATD).
Alors que les attentes étaient grandes, notamment au sein de la classe politique et de l’opinion publique, la juridiction a finalement décidé de reporter son verdict au 4 septembre prochain. Ce renvoi, annoncé sans explication officielle, entretient un climat d’incertitude. Ni la Cour, ni les avocats de l’UFDG n’ont apporté de précisions sur les raisons de ce report, laissant libre cours aux spéculations.
Dans un contexte marqué par l’organisation prochaine du référendum constitutionnel et la préparation des élections générales, l’absence de justification nourrit interrogations et inquiétudes. Beaucoup redoutent que ce délai ne soit interprété comme une manœuvre politique destinée à gagner du temps, alors que chaque décision judiciaire revêt désormais une portée symbolique et stratégique.
Le conflit qui oppose l’UFDG au MATD s’inscrit dans une bataille juridique et politique autour de la reconnaissance et des droits de fonctionnement du parti dirigé par Cellou Dalein Diallo. Selon des informations concordantes, l’UFDG conteste plusieurs décisions administratives du département de l’Administration du territoire, estimant qu’elles limitent sa capacité d’action et menacent sa légitimité politique. Pour le parti, il s’agit d’une question existentielle : être reconnu dans ses droits équivaut à préserver sa place de première force d’opposition et à garantir sa participation au processus électoral. De son côté, le MATD entend défendre la légalité de ses décisions et affirmer son rôle de régulation des partis politiques.
Ce renvoi intervient à un moment particulièrement sensible. Le pays se prépare à un référendum constitutionnel fixé au 21 septembre 2025, étape décisive de la transition en cours. Toute décision de justice touchant un grand parti politique est donc perçue comme un signal fort qui peut influencer les rapports de force et peser sur la dynamique électorale. Une décision favorable à l’UFDG renforcerait sa position et consoliderait son rôle dans les débats à venir, tandis qu’un verdict défavorable risquerait d’alimenter les frustrations et d’exacerber le sentiment d’exclusion exprimé par ses partisans.
La Cour suprême se retrouve ainsi sous une forte pression. Son impartialité et sa capacité à statuer uniquement sur la base du droit seront scrutées non seulement par les acteurs politiques nationaux, mais aussi par la société civile et les partenaires internationaux de la Guinée. L’image de la justice est en jeu : un arrêt jugé équilibré pourrait contribuer à apaiser les tensions, alors qu’une décision perçue comme partiale risquerait au contraire d’attiser la méfiance et de fragiliser davantage la transition.
Dans l’opinion publique, ce report est accueilli avec prudence et scepticisme. Nombreux sont les citoyens qui voient dans ce dossier un test crucial de l’indépendance de la justice guinéenne. Dans un climat où la confiance envers les institutions est mise à rude épreuve, cette affaire dépasse le simple cadre juridique pour devenir un symbole de l’engagement de l’État en faveur de la transparence, de l’équité et du respect du pluralisme politique.
Le 4 septembre, la décision de la Cour suprême sera donc très attendue. Au-delà du règlement d’un contentieux opposant un parti politique à une institution de l’État, ce verdict aura une portée bien plus large : il constituera un signal déterminant pour la suite de la transition et influencera la confiance que les acteurs politiques, les citoyens et la communauté internationale accorderont au processus démocratique en Guinée.
Gaspard Koïkoï pour Investigatorguinee

