La Guinée, pays aux richesses naturelles abondantes et à l’histoire riche, est aujourd’hui à un tournant décisif. Le changement politique, économique et social que le pays aspire à vivre repose en grande partie sur ses citoyens, et surtout sur sa jeunesse. Pourtant, malgré son importance démographique et son potentiel, cette jeunesse semble trop souvent cantonnée au rôle de simple spectatrice des transformations qui s’opèrent autour d’elle. Une situation qui soulève des questions cruciales sur son engagement, ses aspirations, mais aussi les obstacles qui freinent sa pleine participation.
La jeunesse guinéenne représente plus de la moitié de la population. Elle est jeune, dynamique, ambitieuse, mais paradoxalement, elle ne se saisit pas suffisamment des leviers pour être véritablement actrice du changement. Ce constat est d’autant plus préoccupant que c’est cette même jeunesse qui portera demain l’avenir du pays. Pourtant, au lieu d’être aux avant-postes des réformes, des débats, et des innovations, elle semble parfois regarder, attendre, ou pire, s’éloigner des enjeux cruciaux.
Plusieurs facteurs expliquent cette posture. Le premier est lié à un contexte socio-économique difficile. Le chômage, la précarité, le manque d’opportunités réelles découragent beaucoup de jeunes. Sans perspectives concrètes, il devient difficile pour eux de s’engager activement. Le second facteur est politique : le manque de structures et de plateformes qui permettent à la jeunesse de s’exprimer librement et de peser dans les décisions publiques. Trop souvent, elle est marginalisée ou réduite à un rôle décoratif, ce qui entretient un sentiment d’exclusion et d’impuissance.
Le manque d’éducation civique et politique contribue aussi à cette situation. Une jeunesse mal informée ou peu sensibilisée aux mécanismes démocratiques et aux enjeux nationaux est plus encline à rester en retrait, spectatrice d’un changement qu’elle ne contrôle pas. L’éducation, sous toutes ses formes, est donc un levier essentiel pour inverser cette tendance.
Mais il ne faut pas oublier que cette inertie apparente cache aussi une impatience et une frustration légitimes. La jeunesse guinéenne aspire à un changement réel, concret, rapide. Elle veut voir ses efforts récompensés, son talent reconnu, et ses idées prises en compte. Elle attend des autorités qu’elles créent un environnement propice à l’émergence d’une nouvelle génération de leaders, d’entrepreneurs, et de citoyens engagés.
Pour que la jeunesse cesse d’être spectatrice, il faut donc agir à plusieurs niveaux. Il s’agit d’abord de promouvoir une politique volontariste d’emploi et d’insertion socio-économique. Ensuite, de développer des espaces de dialogue où les jeunes puissent s’exprimer, proposer, critiquer sans peur. Enfin, d’investir massivement dans l’éducation, non seulement scolaire, mais aussi civique, culturelle et technologique.
La société civile, les médias, les institutions publiques et les partenaires internationaux ont un rôle fondamental à jouer dans cette dynamique. C’est en fédérant ces forces que la Guinée pourra faire de sa jeunesse un acteur incontournable du changement. Car loin d’être un simple public passif, la jeunesse peut et doit être un moteur de progrès, de stabilité et d’innovation.
En conclusion, le véritable défi est de transformer cette jeunesse spectatrice en une jeunesse actrice, fière, engagée et responsable. Ce changement de posture n’est pas une option, c’est une nécessité. Car l’avenir de la Guinée dépend en grande partie de la capacité de ses jeunes à prendre leur destin en main, à dépasser les obstacles et à construire ensemble un pays meilleur.
Eugène Capi Balamou
Journaliste et communication

