La politique en Guinée, comme dans de nombreux pays africains, demeure profondément marquée par des dynamiques complexes où la quête de pouvoir se conjugue souvent avec la question de la légitimité. Le président de la transition, le Colonel Mamadi Doumbouya, cherche à asseoir sa position avant les élections présidentielles prévues.
Pour ce faire, il cherche à fédérer une alliance avec les leaders de l’opposition. Cette stratégie de rapprochement est loin d’être anodine. Elle vise à obtenir une légitimité tant nationale qu’internationale, dans un contexte où la communauté internationale demeure vigilante quant à la transition démocratique en Guinée. Doumbouya semble vouloir se poser en homme de consensus, tout en manipulant avec habileté les rivalités internes pour rassembler les forces politiques autour de lui. Cette démarche s’inscrit dans une logique d’instrumentalisation des dissensions au sein de l’opposition, comme un moyen de renforcer sa position à l’approche des élections.
L’attrait des leaders d’opposition pour ce rapprochement peut se comprendre à travers plusieurs prismes. D’un côté, certains d’entre eux peuvent voir une opportunité de préserver leurs positions et leurs intérêts personnels dans un contexte incertain. Ils préfèrent ainsi s’allier au pouvoir actuel, au risque de perdre leur indépendance politique. D’un autre côté, cette alliance ne garantit en rien une stabilité politique durable, mais plutôt une continuité de la politique du “deal”, où chaque groupe tente de maximiser ses avantages.
Ce phénomène n’est pas nouveau en Afrique, où les transitions militaires, parfois présentées comme des mouvements “sauveurs” de la nation, finissent souvent par se reconfigurer en systèmes autoritaires où les acteurs politiques se voient contraints de jouer des rôles subordonnés à la volonté du pouvoir en place. Les alliances en période de transition, fréquemment teintées de pragmatisme, risquent ainsi de déboucher sur un véritable “échec et mat” pour la démocratie, surtout si la transition n’aboutit pas à une véritable réconciliation nationale et à des élections transparentes.
Sur le plan africain, cette situation illustre les défis que rencontrent les régimes de transition dans la quête de légitimité politique. L’Afrique, en particulier l’Afrique de l’Ouest, a connu plusieurs coups d’État et transitions depuis la fin de la guerre froide, et l’histoire montre que ces transitions n’aboutissent que très rarement à une démocratisation véritable. Au contraire, elles renforcent des pouvoirs militaires ou autocratiques, mettant en péril la stabilité à long terme des pays concernés. L’issue en Guinée pourrait bien suivre cette tendance, où les compromissions politiques et les manipulations des opposants par le pouvoir en place risquent d’aboutir à une situation où aucune des parties prenantes ne sortira véritablement gagnante.
À l’instar des précédents échecs sur le continent, cette dynamique pourrait rendre la Guinée un exemple de plus des limites de la transition politique en Afrique, marquée par un échec démocratique où la classe politique perd de vue les enjeux fondamentaux de la gouvernance inclusive.
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Cette réflexion vise à ouvrir le débat sur les défis et opportunités que pourraient avoir notre pays dans de telles circonstances . Vos contributions, réactions sont les bienvenues !
Nina Zoumanigui