« L’urgente nécessité pour le général du corps d’armée Mamadi Doumbouya de renforcer la sécurité aux frontières guinéennes : Révision du dispositif sécuritaire, augmentation des effectifs, formation et équipement militaire, et coopération régionale ».
La Guinée, située en Afrique de l’Ouest, traverse une période de transition sous la direction du général du corps d’armée Mamadi Doumbouya, après le renversement du régime de l’ancien président Alpha Condé en 2021. Cette phase transitoire, aussi cruciale que délicate, impose au gouvernement de transition de prendre des décisions stratégiques pour assurer la stabilité du pays. L’un des défis majeurs de cette transition est la sécurité nationale, en particulier celle des frontières guinéennes. Avec ses 3 400 kilomètres de frontières terrestres partagées avec six pays (Sénégal, Guinée-Bissau, Mali, Côte d’Ivoire, Liberia et Sierra Leone), la Guinée fait face à des défis sécuritaires majeurs, exacerbés par la porosité de ses frontières, l’instabilité régionale, et la montée des menaces transnationales telles que le terrorisme, le trafic de drogue, et les flux migratoires incontrôlés.
Dans ce contexte, l’urgence de renforcer la sécurité des frontières s’impose comme une nécessité impérative pour la Guinée. Cela implique non seulement une révision en profondeur du dispositif sécuritaire actuel, mais aussi une augmentation des effectifs militaires, une modernisation des équipements et des infrastructures de surveillance, ainsi qu’une intensification de la coopération régionale pour lutter contre les menaces communes.
Cet article examine en détail les enjeux et les solutions proposées pour répondre aux défis sécuritaires auxquels la Guinée est confrontée.
1. Le contexte géopolitique et sécuritaire de la Guinée : Des frontières vulnérables
La Guinée se trouve dans une région géo-politiquement instable. Le Mali, voisin du nord-est, est aux prises avec une guerre civile depuis 2012, en proie à des groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à l’État islamique. La Guinée-Bissau, à l’ouest, est considérée comme une plaque tournante du trafic de drogue en Afrique de l’Ouest, tandis que la Côte d’Ivoire, la Sierra Leone et le Liberia sortent à peine de décennies de conflits civils et restent fragiles politiquement et économiquement.
Les frontières guinéennes sont en grande partie poreuses, ce qui favorise le passage non contrôlé de personnes, de marchandises illicites et d’armes. Cette situation rend le pays particulièrement vulnérable aux infiltrations de groupes terroristes, aux réseaux de trafiquants, et aux rebelles des pays voisins. Le contrôle efficace de ces frontières est donc essentiel non seulement pour la sécurité nationale de la Guinée, mais aussi pour la stabilité régionale.
Les autorités guinéennes, sous la direction du général Mamadi Doumbouya, se doivent de répondre à cette urgence sécuritaire en révisant le dispositif actuel. Le défi principal est d’adapter ce dispositif aux nouvelles réalités sécuritaires, en tenant compte de la montée des menaces transnationales. Cela implique une approche intégrée, combinant des mesures de surveillance, un renforcement des effectifs militaires et une modernisation des équipements, tout en renforçant la coopération avec les pays voisins et les organisations régionales comme la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest).
2. Révision du dispositif sécuritaire : Moderniser pour mieux protéger
La première étape vers un renforcement efficace de la sécurité aux frontières guinéennes est la révision du dispositif sécuritaire actuel. Celui-ci, largement hérité des administrations précédentes, n’est plus adapté aux menaces modernes telles que le terrorisme transfrontalier, le trafic de drogue et d’armes, et les conflits armés régionaux. Le dispositif actuel, basé essentiellement sur des patrouilles terrestres et des points de contrôle fixes, montre des limites flagrantes face à des menaces de plus en plus mobiles et sophistiquées.
Pour y remédier, il est impératif de moderniser ce dispositif en intégrant les technologies de surveillance et de renseignement les plus avancées. Cela inclut l’utilisation de drones de surveillance pour surveiller les zones difficiles d’accès, la mise en place de systèmes de surveillance électroniques aux points de passage sensibles, et l’amélioration des capacités de renseignement pour détecter les menaces à un stade précoce. Les nouvelles technologies de surveillance, couplées à une meilleure coordination avec les agences de renseignement régionales et internationales, permettraient à la Guinée d’avoir une vision plus claire et plus complète de la situation sécuritaire le long de ses frontières.
Par ailleurs, la révision du dispositif sécuritaire doit s’accompagner d’une réorganisation des forces armées et des services de sécurité chargés de la surveillance des frontières. Il est essentiel de créer des unités spécialisées dans la lutte contre les menaces transnationales, équipées des moyens nécessaires pour répondre rapidement à toute intrusion ou activité suspecte.
3. Augmentation des effectifs militaires et renforcement de la formation
Un autre aspect crucial de cette stratégie de renforcement est l’augmentation des effectifs militaires, en particulier ceux chargés de la sécurité des frontières. Actuellement, les forces armées guinéennes sembleraient avoir manquent d’effectifs suffisants pour couvrir efficacement les 3 400 kilomètres de frontières. Cet effectif réduit rend la surveillance de vastes étendues de territoire extrêmement difficile, voire impossible, créant ainsi des zones non sécurisées propices aux activités illicites.
Le général Doumbouya pourrait envisager un programme de recrutement massif pour augmenter les effectifs militaires affectés aux frontières. Ce programme devra inclure non seulement des soldats, mais aussi des unités spécialisées dans la surveillance aérienne et maritime, compte tenu de la proximité de certaines frontières avec des zones côtières. Une fois recrutés, ces nouveaux soldats devront bénéficier d’une formation adéquate, adaptée aux réalités géopolitiques et sécuritaires contemporaines.
La formation militaire doit évoluer au-delà des techniques de combat classiques pour inclure une compréhension approfondie des dynamiques terroristes et criminelles régionales, l’utilisation des nouvelles technologies de surveillance, et la gestion des crises transfrontalières. En outre, la formation à la collaboration avec les forces militaires et policières des pays voisins est essentielle pour garantir une réponse coordonnée et efficace face aux menaces communes.
4. Modernisation des équipements militaires : L’impératif technologique
La modernisation des équipements militaires est un autre pilier fondamental de la stratégie de renforcement des frontières. Les forces armées guinéennes utilisent actuellement des équipements obsolètes qui ne sont pas à la hauteur des défis contemporains. Le renforcement de la sécurité des frontières nécessite des technologies de pointe, telles que des systèmes de communication sophistiqués, des drones de surveillance, des caméras thermiques pour détecter les mouvements nocturnes, et des véhicules blindés pour patrouiller les zones sensibles.
La Guinée devra également investir dans des systèmes de défense modernes, capables de protéger efficacement les postes de contrôle et les garnisons frontalières contre d’éventuelles attaques armées. Cette modernisation pourrait être facilitée par des partenariats avec des puissances internationales disposant d’une expertise militaire reconnue, telles que la France, les États-Unis ou la Russie.
5. Coopération régionale : Une approche collective contre les menaces transnationales
L’un des défis majeurs dans la gestion des menaces transfrontalières est la nature transnationale des menaces elles-mêmes. Qu’il s’agisse de terrorisme, de trafic de drogue ou de migration clandestine, ces phénomènes dépassent les frontières nationales et nécessitent une réponse coordonnée à l’échelle régionale. Pour renforcer efficacement la sécurité de ses frontières, la Guinée ne peut agir seule. Une coopération renforcée avec ses voisins est indispensable pour assurer une sécurité collective dans la région.
Le général Doumbouya devra intensifier les efforts de coopération militaire avec les pays frontaliers, en particulier avec ceux qui partagent les mêmes préoccupations sécuritaires, comme le Mali et la Côte d’Ivoire. Des accords bilatéraux ou multilatéraux de défense pourraient être mis en place pour organiser des patrouilles communes, partager les renseignements et coordonner les actions militaires contre les groupes armés et les trafiquants.
La Guinée pourrait également renforcer sa coopération avec des organisations régionales telles que la CEDEAO et l’Union africaine, qui jouent un rôle clé dans la gestion des crises sécuritaires en Afrique de l’Ouest. L’intégration de la Guinée dans les missions de maintien de la paix et les exercices militaires conjoints permettrait d’améliorer les capacités de réponse rapide des forces armées guinéennes et d’accroître leur expertise en matière de gestion des menaces transnationales.
La sécurité des frontières, un impératif pour la transition guinéenne
La sécurité des frontières guinéennes est une priorité incontournable pour le général Mamadi Doumbouya et son gouvernement de transition. Dans un contexte régional instable, marqué par des menaces transnationales croissantes, la Guinée doit impérativement renforcer son dispositif sécuritaire, moderniser ses forces armées et intensifier sa coopération avec les pays voisins et les organisations régionales.
Sans une gestion rigoureuse et proactive de la sécurité aux frontières, la Guinée risque non seulement de voir sa propre stabilité compromise, mais aussi de devenir un point de passage ou de refuge pour des groupes terroristes, des trafiquants et d’autres acteurs criminels. En révisant le dispositif sécuritaire, en augmentant les effectifs militaires, en modernisant les équipements et en renforçant la coopération région.
Par Oumar THIAM/ activiste de la société civile guinéenne, analyste politique et spécialiste des questions sécuritaires.