L’histoire des sondages montre que s’ils ont été utiles entre 1936 et l’an 2000, ils sont depuis 2002 objet de connivence et d’influence réelle des opinions publiques non pas en raison des méthodes utilisées uniquement mais par les liens trop étroits entre dirigeants politiques et médiatiques et patrons d’instituts de sondage. Ils sont devenus par l’importance qui leur est accordée, un outil de marketing politique à part entière. Mieux, ils sont au cœur des stratégies de campagne électorale et par ricochet de communication politique.
Quand tout à commencer, regard sur le passé
En 1936, lors de la campagne présidentielle américaine qui opposait le républicain et gouverneur du Kansas Alf Landon au démocrate sortant Franklin Delano Roosevelt, deux organismes de sondage concluent des résultats complètement différents. Le premier, c’est le magazine The Literary Digest qui prédit une victoire de Landon avec 57% des voix. En effet, le magazine a sondé des millions d’américains à travers la méthode dite de « vote de paille » effectuée par téléphone. L’American Institute of Public Opinion quant à lui donne Roosevelt victorieux avec 56 % des voix grâce à la méthode basée sur un échantillonnage représentatif auprès de 10 millions de citoyens américains[1].
Franklin Roosevelt sera réélu président des Etats-Unis avec 62 % des voix en novembre 1936. Cette victoire sera le véritable point de départ des sondages d’opinion et fera le plébiscite de l’American Institute of Public Opinion. Plus loin, la victoire de Roosevelt va ipso facto assoir à la fois la légitimité mais également la crédibilité de l’institut fondé par George Gallup[2]. Popularisé Gallup institute du nom de son fondateur, l’American Institute of Public Opinion sera courtisé par plusieurs hommes politiques. George Gallup choisira de travailler davantage avec les médias. Un choix stratégique puisque nous comprendrons plus tard l’influence exercée sur les opinions publiques à travers les médias et sur la base des résultats d’instituts de sondage.
Le revers subi par le magazine The Literary Digest au soir de la réélection de Franklin Delano Roosevelt va entraîner sa chute vertigineuse. Et pourtant, c’était un magazine de référence et le plus important aux Etats-Unis. Ses enquêtes pré-électorales et sa technique de « vote de paille » étaient reconnues et il jouissait de ce fait d’une nette crédibilité.
Faut-il le rappeler, George Gallup était directeur de recherche marketing de l’agence publicitaire Young & Rubicam avant de créer l’American Institute of Public Opinion. C’est un publicitaire dans l’âme qui a influencé les méthodes de sondage dans le monde et particulièrement en France. C’est lui qui a inspiré Jean Stoetzel, précurseur et importateur dans l’Hexagone du sondage d’opinion, un terme qu’il a par ailleurs inventé[3].
Stoetzel a fondé en novembre 1938 le premier institut de sondage en France, appelé l’Institut Français d’Opinion Publique (Ifop) qu’il a voulu totalement indépendant et « sans intention commerciale, dans un esprit de recherche scientifique, à la fois pour investiguer au jour le jour les faits d’opinion et pour analyser les conditions sociologiques de ce phénomène »[4].
Il démissionnera du conseil d’administration de l’Ifop le 10 août 1979 et déclarera en substance : « J’ai fondé l’IFOP en 1938. J’y suis attaché. Je désapprouve la politique décidée par la majorité du conseil d’administration. Elle met la société dans le plus grand péril. Elle a déjà entraîné, à l’extérieur un discrédit moral et technique, à l’intérieur une démoralisation profonde du personnel et une détérioration de l’instrument (…). »[5].
En 1936, l’année de création de l’Ifop, Jean Stoetzel réalisera le premier sondage en France au sujet de Dantzig[6] (aujourd’hui appelée Gdańsk et située en Pologne) annexée par l’Allemagne hitlérienne. La question posée aux Français était la suivante : « Faut-il mourir pour Dantzig ? ».
76 % des Français avaient une opinion favorable. Autrement dit, ils étaient contre l’annexion et par conséquent d’accord pour « mourir pour Dantzig ». La Seconde Guerre mondiale va éclater à cause de cette annexion et par le jeu des alliances.
Les sondages et leur pédigrée de fiabilité douteux
Les sondages ont montré au cours de l’histoire que leur fiabilité s’est érodée et qu’ils portent le germe de leur défiance. En 1948, Gallup Inc., prédit comme la majorité des sondeurs américains, la défaite du démocrate Harry S. Truman à l’élection présidentielle face au candidat républicain Thomas Dewey donné très largement vainqueur du duel. A la surprise générale, c’est Truman qui sera élu Président des Etats-Unis et va même reprendre le contrôle du Congrès. Truman avait pourtant subi de sévères critiques y compris des caciques du parti démocrate car les sondages avaient déjà installé un climat de doute et d’anxiété autour de la défaite.
Contre vents et marrées, il défiera les sondages jusqu’à 4 heures du matin, quand un agent des services secrets américains le réveilla, lui annonça sa victoire (avec 49,5 % des voix contre 45,1 % pour Dewey) et la prise en charge complète de sa sécurité. C’est le début de la déroute des sondages.
Le parallèle en France, c’est François Hollande, surnommé « Monsieur 3% » lors de la primaire de gauche de l’été 2011. Contre les sondages, Hollande maintient sa candidature malgré l’influence de Dominique Strauss-Kahn à l’époque patron du FMI et potentiel candidat du PS à l’élection présidentielle. Tout le monde connaît la suite, François Hollande sera le septième président de la Ve République grâce à 51,56 % des suffrages exprimés contre 48,44 % pour le président sortant Nicolas Sarkozy.
Au fond, il faut noter une erreur monumentale des sondages et leur lot de contradictions. Après le duel télévisé François Hollande vs Nicolas Sarkozy au premier tour de la présidentielle de 2012, les sondages se sont excités. La Dépêche du Midi titre le 14 mars de la même année de la façon suivante : « La guerre des sondages : qui croire ? ».
En effet, quelques heures après le débat, un sondage Ifop Fiducial réalisé pour Europe 1, Paris-Match et Public Sénat avait alors été divulgué. Il plaçait le président sortant Nicolas Sarkory en tête du premier tour avec 28,5 % d’intentions de vote (+1,5 point) et Hollande 27 % (-1,5). Comme le rapporte Challenges[7], un sondage TNS Sofres Sopra Group pour i>Télé plaçait au contraire François Hollande en tête des intentions de vote avec 30% stable contre 26% (-2 points) pour Sarkozy.
Un autre sondage CSA pour RMC, BFMTV et 20 Minutes[8] concluait aussi que Hollande serait en tête des intentions de vote au premier tour. Cette contradiction créa des tensions dans les états-majors politiques des deux camps. Tous étaient chauffés jusqu’à l’incandescence.
Il est intéressant de lire à ce titre les justifications dans Atlantico, de Guillaume Peltier, alors porte-parole adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy. Il soutenait mordicus que Sarkozy allait être en tête au premier tour, mettait en cause les sondages défavorables à son candidat et glorifiait le seul sondage favorable à Sarkozy[9].
Comme le rappelle Frédéric Miche, directeur général adjoint d’OpinionWay, dans son livre « Le Sacre de l’Opinion. Une histoire de la présidentielle et des sondages », Nicolas Sarkozy était très en colère contre les sondages et leur débâcle. Son entourage jusqu’au porte-parole du premier ministre également.
Aux Etats-Unis, en Espagne et en France, les sondages échouent à prédire
Inutile de revenir sur toutes les déroutes des instituts de sondage, elles sont bien trop nombreuses. Cependant, deux exemples récents aux Etats-Unis et en France montrent très bien « ces erreurs » manifestes au goût très amer des sondages d’opinion.
Nous sommes en 2016, un certain Donald Trump, candidat malheureux aux primaires républicaines de 1996 et homme d’affaires, est de retour sur la scène politique. Il est candidat à l’élection présidentielle pour succéder à Barack Obama face à la candidate démocrate Hillary Clinton. Commentateurs, chroniqueurs, une partie importante des grands médias et les instituts de sondage parient unanimement sur l’échec cuisant de Trump et la victoire écrasante de Hillary Clinton.
Clinton est créditée par les sondages de 300 grands électeurs alors que 270 suffisent pour être élu.e[10]. Le site FiveThirtyEight.com (média en ligne spécialisé dans le journalisme de données et affilié au New York Times)[11] est encore plus rassurant. Pour lui, « Clinton est favorite à 71 % pour remporter l’élection selon notre modèle basé sur les sondages uniquement et à 72 % selon notre modèle basé sur les sondages plus »[12]. Résultat des courses : Donald Trump est élu 45ème président des Etats-Unis avec le soutien de 304 grands électeurs contre 227 pour Hillary Clinton.
Il faut préciser que Clinton était bien en tête des votes populaires. Mais ce qui compte finalement, c’est le vote des grands électeurs. Clairement, qu’ils s’agissent des votes populaires ou des grands électeurs, toutes les projections la donnaient victorieuse.
En 2023, dans le cadre de la campagne des élections législatives du 23 juillet en Espagne, EL PAÍS, le quotidien de centre gauche, journal le plus lu du pays, écrit ceci en chapô : « Le résultat le plus probable est que PP et Vox soient majoritaires (55 % du temps), mais un calcul serré et un gouvernement de gauche ne seraient pas surprenants »[13]. Plus loin dans l’article, le journal parle « d’erreur naturelle des sondages » pour probablement se prémunir contre toute critique.
En clair, le parti populaire (la droite espagnole) et Vox (parti d’extrême droite) obtiendraient selon les sondages la majorité absolue pour gouverner le pays. L’inquiétude gagne alors l’Europe. La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki et le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán apportent officiellement leur soutien à Vox.
A l’annonce des résultats à la télévision publique TVE, c’est la douche froide. PP-Vox n’ont pas eu la majorité absolue et ne pourront pas gouverner le pays. Les sondages se sont une nouvelle fois « trompés ». Vox est passé de 52 sièges de députés au Congrès en 2019 à 33 sièges en 2023, soit dix-neuf sièges perdus. Le Parti populaire espagnol (PP) obtient 136 sièges, or il faut 176 pour disposer d’une majorité pour gouverner. Le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) limite les casses en obtenant 122 sièges, plus qu’en 2019[14].
En France, le 9 juin 2024, Emmanuel Macron, président de la République annonce à la télévision sa décision de dissoudre l’Assemblée parlementaire après la victoire historique aux européennes du Rassemblée nationale (ex. Front nationale, parti de Jean-Marie Le Pen) classé comme extrême droite par le ministère de l’Intérieur. Ce qui se dessine sera donc exceptionnel dans l’histoire de la Ve République.
Tous les instituts de sondage placent en tête au premier comme au second tour en intentions de vote comme en projections de sièges, le Rassemblement nationale et le crédite de la majorité avec ses alliés comme les LR pro Éric Ciotti.
Quatre jours avant le scrutin du second tour, un sondage d’Odoxa, réalisé pour Mascaret, Public Sénat, la presse régionale et le Nouvel Obs table sur une victoire du RN. Le parti et ses alliés obtiendraient entre 210 et 250 sièges[15]. Le Nouveau Front populaire serait la deuxième force politique à l’Assemblée nationale avec entre 140 et 180 sièges et le camp présidentiel la troisième force politique pour 115 et 155 députés élus.
La contradiction
La Tribune Dimanche, Toluna Harris Interactive, l’Ifop et l’Ipsos, tous se sont plantés. Ils avaient prédit une majorité pour le RN et ses alliés. Rien de tout ce qui avait été annoncé ne s’est produit. Le dimanche 7 juillet à 20h, c’est la surprise générale : le Nouveau Front populaire est majoritaire, la coalition présidentielle est en deuxième place, le RN et ses alliés occupent la troisième place. Une fois de plus, les sondages ont échoué à prédire.
Pour justifier cet échec, le lundi 8 juillet, le lendemain du vote du second tour, Frédéric Dabi, Directeur général Opinion Groupe Ifop, est passé au studio de Sud Radio pour expliquer que « Le jeu des désistements a enclenché un ‘front républicain’ bien plus fort qu’en 2022. On sentait une tendance à la baisse dans les derniers jours ».
Le journaliste est allé dans son sens sans la moindre contradiction, la moindre question sur les questionnaires, les méthodes utilisés, la façon dont les données sont interprétées, la commande des clients. Frédéric Dabi, en disant cela, apporte une caution de son autorité de directeur d’un important institut de sondage à une affirmation qui pose un problème de fond majeur : On ne peut pas être à la fois juge et partie.
En effet, Odoxa disait dans son sondage réalisé le 4 juillet 2024, que le « Le Front Républicain n’existe plus vraiment en tant que réflexe spontané des électeurs mais le « désistement républicain », lui, fonctionne de façon extrêmement efficace ». Comment peut-on analyser ces deux affirmations antinomiques ? Qui croire ? Quels liens les médias et les instituts de sondage entretiennent-ils ? Peut-on parler de collusions ?
Les sondages, un marketing d’audience
Les médias sont friands de résultats de sondage au point qu’ils en commandent directement auprès des instituts. Lors des campagnes des élections législatives de cette année, dès après la publication des sondages du premier ou encore du second tour, on pouvait observer une agitation sur les plateaux de télévision, des éditions spéciales, des interventions de patrons d’instituts de sondage.
Les chaînes d’information en continu sont en ébullition. Le tout couronner par des Unes pompeuses, une théâtralisation de l’information, des chroniqueurs et des commentateurs qui abondent tous dans le même sens sous l’autel de l’esprit critique.
Si tenter qu’il y a un invité qui ne fait pas le jeu des plateaux mais de l’analyse, un « contradicteur » est alors mis en face de lui de sorte à créer la polémique et chauffer les plateaux. C’est le travail des programmateurs (appelés attachés de production en radio et producer à la télévision). Car il faut bien faire grandir les audiences et attirer les annonceurs pour vendre des espaces pub TV. Les coupures publicitaires devenant ainsi plus importantes. Le show d’abord et l’information après.
Les sondages, c’est comme la primeur, détenir le premier l’information est un enjeu d’audience et donc de publicité. Ce modèle économique et ce fonctionnement posent beaucoup de questions d’éthique lors des rendez-vous électoraux que la loi devrait plus encadrer. Les sondeurs doivent aussi rendre des comptes.
L’effet moutonnier et les biais cognitifs : De l’influence en démocratie
Pour nombre de Français, tout ce qui passe à la télé est une vérité universelle insusceptible de contradiction. Noam Chomsky et Edward Hermand nous enseignent dans « La fabrication du consentement : De la propagande médiatique en démocratie » (1988), comment l’information est devenue un bien marchand et sa production façonnée dans l’intérêt exclusif de l’économie de marché. Les faits, sacrés en journalisme, ne sont plus présentés de la même manière selon l’idéologie défendue par chaque média.
Les médias participent, par leur influence, à faire ou défaire une élection. Ils influencent le comportement du corps électoral par différents prismes et mécanismes. Plus un candidat est médiatiquement exposé, plus il a des chances d’emporter l’adhésion populaire. De Thomas Jefferson (en 1800 aux Etats-Unis) en passant par Emmanuel Macron (2017) jusqu’à Jordan Bardella (2024) en France, les médias ont participé à faire élire des candidats.
Souvent, après la publication des sondages, les éditorialistes, chroniqueurs et commentateurs prennent le relais et matraquent les opinions publiques. Ainsi et de façon inconsciente, un candidat hier détestable peut-être aujourd’hui admiré, adulé, un parti politique hier jeté dans les décombres de l’histoire et de la philosophie peut-être aujourd’hui réhabilité.
L’effet moutonnier se trouve dès lors activé dans la mesure où les gens s’autocensurent, suivent les prescriptions des médias et rentrent dans une logique de bulle cognitive. Cet enferment et cette volonté de faire et d’agir comme « tout le monde » est le résultat d’un processus lent de modification des jugements de l’opinion publique au point que certains individus tombent dans ce qui peut s’apparenter au conformisme et à la blemmophobie. Par conséquent, les sondages et les médias conditionnent l’opinion et fabriquent les élections.
Les sondages, l’idée de génie du XIXe siècle
Au demeurant, il faut rappeler que la création des sondages est une idée de génie dans les démocraties. Ils ont eu beaucoup de succès et ont prédit à la virgule près des échéances électorales historiques en Europe comme aux Etats-Unis. Leur invention relève de l’exceptionnel et de l’inédit. Il faut qu’ils continuent d’exister pour participer à éclairer les décideurs et accompagner la marche du monde. Cela doit se faire en abandonnant toute idéologie et en revenant, sinon en s’approchant, à la philosophie de départ de l’Ifop « sans intention commerciale, dans un esprit de recherche scientifique, à la fois pour investiguer au jour le jour les faits d’opinion et pour analyser les conditions sociologiques de ce phénomène » et en toute indépendance.
La sphère d’influence des sondages est infinie et va jusqu’au choix des Premiers ministres. Cela est un problème démocratique. En 2015, Tony Abbott Premier ministre australien depuis 2013, est destitué et remplacé par Malcolm Turnbull, son ministre de la Communication. Pour cause, sa côte de popularité est tombée à 27% d’opinions favorables. Les sondages sont au cœur de la politique de gouvernement en Australie et cela est parfaitement résumé en une phrase par un article de The Conversation « Vivre selon les sondages, mourir selon les sondages – ou, peut-être, bénéficier d’un sursis selon les sondages »[16].
En France, deux mois avant la nomination de Gabriel Attal comme Premier ministre en janvier 2024, les sondages disaient déjà qu’il était la personnalité favorite des Français et en tête des baromètres de popularité des personnalités politiques devant Edouard Philippe, ancien Premier ministre. Quelques mois après sa nomination, les sondages l’ont encore légitimé. Les sondages sont-ils devenus des faiseurs de rois ?
La manipulation des résultats de sondage et les manœuvres électorales
Quelques pratiques montrent que les instituts de sondage trainent beaucoup de casseroles et sont pour la plupart au service d’une idéologie et certains de leurs résultats truqués pour des raisons politiques[17].
En 1965, pour la première fois en France, le président de la République est élu au suffrage universel direct. Alors qu’il avait été désigné chef de l’Etat sept ans plus tôt par un collège de grands électeurs, le général de Gaulle se présente candidat et face à lui François Mitterrand, le candidat unique de la gauche (SFIO, PCF et Parti radical). Alors qu’il était sûr d’une élection dès le premier tour, le général est mis en ballotage. Coup de théâtre !
Dans le secret, la Direction centrale des Renseignements généraux du ministère de l’Intérieur réalise une étude de sondage. Sur ordre du ministère, les résultats sont modifiés. On impose alors au quotidien France-Soir de publier des chiffres falsifiés pour laisser apparaître une victoire du général et contrer ainsi les autres instituts de sondage mais aussi influencer l’opinion publique. Bien entendu, les sondages diront que le général est en tête des intentions de vote. Charles de Gaulle sera par ailleurs élu avec 55,2 % des voix contre 44,8 % pour son adversaire François Mitterrand.
Le 4 janvier 1979, Le Monde rapporte, citant une enquête de l’hebdomadaire satirique Le Canard enchaîné, que le directeur général de l’Ifop, Jean-Marc Lech, aurait modifié les résultats de deux sondages portant sur la présence en France des travailleurs immigrés avant d’être livrés. L’intention aurait été de ne pas mécontenter le secrétariat d’État aux travailleurs immigrés qui avait commandé le sondage[18]. A l’époque, en lien direct avec l’affaire de « bricolage » des résultats de sondage, l’Ifop avait été radié de la Chambre des sociétés d’études et de conseil (SYNTEC).
En définitive, toutes les grandes échéances électorales sont aujourd’hui déterminées par les sondages en dépit des nombres de fois où ils se sont trompés. Il est donc urgent qu’ils bénéficient d’un encadrement législatif plus rigoureux.
Kossa Camara, Communicant.