Le Niger, le Mali et le Burkina Faso quittent la CEDEAO. Ces trois(3) pays Sahéliens en transition se constituent en Alliance des États du Sahel(AES). Outre ce retrait, ils annoncent la création d’une monnaie pour la nouvelle zone géopolitique. Cette décision, selon ces États fait suite à l’échec de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest(CÉDÉAO). Pour ces militaires arrivés au pouvoir par des armes, la Communauté économique à laquelle appartenaient leurs pays, s’est éloignée des idéaux de ses pères fondateurs, du Panafricanisme et serait téleguidée par des puissances étrangères.
Comme une réponse du berger à la bergère, cette posthure des putschistes a été bottée en touche par l’organisation via un communiqué. Elle récuse la démarche des putschistes et se montre plutôt disposée à trouver une solution. Face à cette énième passe d’armes, qui des dirigeants de la CEDEAO ou de l’alliance des États du Sahel( AES) aura le dernier mot? Quelles analyses pouvons-nous faire de cette nouvelle manœuvre du Mali, du Burkina Faso et du Niger? La CÉDÉAO pourra- t- elle encore faire face aux défis de l’heure?
En effet, le départ des trois(3) pays Sahéliens de la communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest est une pillule qui ne passe à la gorge des dirigeants de la communauté ouest africaine. Ces derniers qui rougissent de colère disent n’avoir pas été saisis préalablement, donc pas directement informés. Ils disent avoir lu un communiqué conjoint des trois(3) pays via des chaînes de télévision. De ce fait, la CÉDÉAO dit considérer les États démissionnaires comme membres de l’organisation. Par conséquent, se montre plutôt disposée à trouver une solution.
Ce positionnement de la CÉDÉAO n’explique- t- il pas un aveu d’échec de Tinubu, actuel homme fort de l’entité sous- régionale face aux militaires qui sont dans une logique de défiance? Si non, le communiqué conjoint relatif à ce retrait est quand même réel. Ce qu’on peut reprocher au Capitaine Ibrahim Traoré, au Colonel Assimi Goita et au Général de brigade Abdourahamane Tiani, respectivement Chefs d’État de la République du Burkina Faso, de la République du Mali et de la République du Niger, c’est le manque de pédagogie ou le non- respect de la loi en la matière.
En tout cas ce retrait de la CEDEAO est réglé par l’article 91 de la charte qui guide cette institution. Cet article stipule que : «Tout Etat membre désireux de se retirer de la Communauté notifie par écrit, dans un délai d’un (1) an, sa décision au Secrétaire exécutif qui en informe les Etats membres. A l’expiration de ce délai, si sa notification n’est pas retirée, cet Etat cesse d’être membre de la Communauté ». Et l’alinéa 2 d’ajouter : «Autour de la période d’un (1) an visée au paragraphe précédent, cet Etat membre continue de se conformer aux dispositions du présent traité et reste tenu de s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du présent traité ».
De l’avis de certains juristes, ces trois(3) pays ne sont pas dans ce schéma surtout en tenant compte du bras de fer engagé entre les juntes militaires au pouvoir et l’Organisation économique Ouest Africaine. La CÉDÉAO visiblement attend d’être saisie par des pays suspendus, mais cette stratégie soulève les questions de parallélisme et d’influence de l’organisation.
Les recommandations des chefs d’État issues des sommets ont- elles été respectées et exécutées depuis le début des transitions dans les trois(3) pays? Qu’en est- il du retour à l’ordre constitutionnel dans ces pays respectifs? Les chronogrammes proposés seront-ils respectés? En attendant des réponses à ces multiples interrogations qui brûlent les lèvres des citoyens, les militaires au pouvoir déroulent paisiblement leurs programmes et agendas sous l’œil impuissant d’une organisation visiblement téleguidée et influencée par certaines puissances étrangères.
S’agissant du parallélisme de forme, les décisions de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sont généralement prises lors des assemblées ou sommets qui se font à l’absence des militaires et sont généralement publiées sur le site de l’organisation et d’autres médias traditionnels. Donc, c’est la même stratégie usée cette fois par des dirigeants militaires des pays en transition qui ne veulent pas aussi organiser des élections de sitôt pour rejoindre les casernes.
Donc, autant on condamne les agissements des trois(3) pays qui menacent de retirer le franc CFA au profit d’une autre en perspective et qui n’ont pas trouvé encore la solution à l’épineuse question de sécurité, autant il faut condamner les échecs répétés des dirigeants de la CÉDÉAO qui peinent à juguler le phénomène de coup d’État.
Sur ce point les dirigeants de l’organisation restent bouches cousues sur les tripatouillages des constitutions, l’emprisonnement des opposants politiques, souvent à l’origine de la descente musclée des militaires dans l’arène politique. En attendant, le départ des trois pays Sahéliens résonne comme un aveu d’échec de la CÉDÉAO qui doit agir par la manière forte afin de se faire respecter par tous les pays membres que de continuer à se morceler. Ce retrait ne va-t-il pas accélérer le processus de réintégration des putschistes qui en ont fait la demande sans succès? Tout porte à croire que si cette stratégie s’executait ç’en est terminé pour la CÉDÉAO, elle mourra de sa belle mort.
N’faly GUILAVOGUI, Éditorialiste politique, Journaliste, Mastérant en Communication politique et publique à l’ISIC.