Depuis ce samedi matin, je suis sans voix, aphone, étreint par la douleur, la tristesse et subjugué par l’émotion, le chagrin… perdu dans les nuages des tourments… incapable d’accepter l’acceptable, l’évidence des faits… l’annonce du rappel à Dieu du Mastodonte de la comédie, l’AS du rire et de la détente… le légendaire SOW Bailo…Tchop -Tchop. L’homme était certes fatigué par la maladie mais se battait avec vaillance…de toutes ses forces, empreint d’humilité, de courage et de dévotion ayant à son chevet sa remarquable et admirable épouse et compagne de vie.
Avec la disparition de Sow Bailo, le monde de l’art et de la culture guinéen perd un patrimoine précieux. Charles Bailor, le rebelle de Hamdallaye a en effet, égayé des générations entières avec ces sketches comiques qui déclenchaient un fou rire à n’en pas finir.
Mon sanakou qui maniait avec aisance et satire les langues du terroir avait le don de détendre l’atmosphère, d’épicer les rencontres de familles, d’animer les cérémonies festives ou de tenir en haleine le public et les fans sur la lucarne joyeuse.
Sur les scènes de spectacle en « one man show » Sow Bailo électrifiait le public qu’il plongeait en transe. Je le revois sur scène au Palais du Peuple, parler de Garafiri et le retour du courant pour pallier aux villes plongées dans l’obscurité…entonnant en chœur… » il n’est jamais trop tard …Le courant sera là… » Qui ne se rappelle du dialogue insensé entre la femme peulhe et la dame soussou dans un contexte d’épidémie de choléra » ? compini…inaka kombi nani…igbe n see nara….isee n gbenara…dans un patois qui ne laissait personne insensible.
Le comique de légende au cœur d’or et à l’humanisme inégalable nous laisse un vide énorme. Ingénieur à la météo, l’homme ne quittait ma belle-famille où il avait lié des liens indéfectibles… Barry que nous sommes, il ne ratait aucune occasion pour nous flinguer en bon sanakou.
Dors en paix grand artiste, homme de culture, maître de la parole et de la parodie. Tu donnais un sel à nos vies. Tu déstressais le monde plongé dans la sinistrose et l’angoisse. Tu rendais la vie agréable malgré les chocs et déceptions.
Rien qu’en rencontrant nos cœurs étaient allégés et nos visages rayonnant de bonheur et de joie. Sow Bailo avait une bonhomie contagieuse…la bonne humeur. Il nous a fait passer des momm3nts inoubliables lorsqu’il esquissait des pas de danse au rythme latino soutenu par sa voix rocailleuse imitant l’orchestra Aragon de Cuba.
Mon cher Sow Bailo….je sais d’ores et déjà que d’où tu es (sans doute dans le paradis céleste)…tu nous regardes avec un sourire moqueur et décapant…en nous disant… je vous ai bien eu…mortels Guinéens, la tête toujours dans le guidon à la recherche du pain quotidien dans le gbeleya qui dit pas son nom….
Mon cœur saigne… la gorge nouée…des larmes dégoulinent sur mon visage rien qu’en me rappelant de nos dernières rencontres lorsqu’on préparait la soirée de gala pour te célébrer vivant…tu étais plein d’espoir pariant sur un avenir radieux. Je rends hommage à ta brave femme, modèle de fidélité et de loyauté. Toujours là dans les moments d’épreuves sans languir ou renoncer.
Sincères condoléances à elle, à ta famille biologique, à la famille culturelle, et aux Guinéens qui te chérissent.
Adieu cher ami …Dors en paix pour avoir accompli avec honneur et dévouement ta part du boulot au service de la Guinée et des Guinéens qui, de toutes classe d’âge, de confessions, de régions ou de corporations saluent à l’unisson ta mémoire, adressant de ferventes prières pour le repos éternel de ton âme.
Ton sanakou un jour…ton sanakou pour toujours.
Ibrahima ahmed Barry/ Expert Senior journaliste consultant Guinée