A l’occasion de la journée mondiale de la liberté d’expression célébrée ce 03 mai, Reporters sans frontières (RSF) a dévoilé le classement mondial sur la liberté d’expression. Dans ce classement établi sur la base d’indicateurs d’ordre politique, économique, législatif, social et sécuritaire, la Guinée arrive au 85ème rang mondial, avec un score global de 59,51, alors qu’au compte de l’année 2022, le pays s’était classé 84ème. On peut donc considérer que la Guinée a stagné, d’une année à l’autre. Mais il importe de noter qu’en Afrique, la Guinée arrive bien derrière la Gambie (46ème), la Côte d’Ivoire (54ème), le Burkina Faso (58ème), le Libéria (66ème), le Togo (70ème), la Sierra Léone (74ème), la Guinée Bissau (78ème) ou encore le Congo Brazzaville (81ème).
Globalement, voici comment Reporters Sans Frontières (RSF) aborde les défis en matière de liberté de la presse dans notre pays
Paysage médiatique
Le paysage médiatique est pluraliste. La loi sur la liberté de presse de 2010 empêche une concentration excessive des médias. Depuis les années 1990, la presse écrite est florissante : sur 65 hebdomadaires existants, dix paraissent régulièrement, qu’il s’agisse de journaux satiriques comme Le Lynx, ou de journaux d’information générale comme L’Indépendant. Le secteur audiovisuel est composé d’au moins 60 radios et d’une dizaine de chaînes de télévision. En ligne, une centaine de sites d’information ont vu le jour en 25 ans. Pourtant, la production d’informations critiques et indépendantes reste difficile, particulièrement lorsque celles-ci mettent en cause des membres du gouvernement ou des forces de sécurité.
Contexte politique
Durant la présidence d’Alpha Condé (2010-2021), les autorités tentaient régulièrement de censurer les médias critiques du pouvoir. Quelques semaines après l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement de transition, le Premier ministre s’est engagé, lors d’une rencontre avec RSF, à défendre la liberté de la presse. La politique du gouvernement est assez discriminatoire vis-à-vis de la presse : les médias de service public sont favorisés aux dépens des médias privés en ce qui concerne les communications gouvernementales.
Cadre légal
La fin des peines privatives de liberté pour les délits de presse consacrée dans la loi sur la liberté de la presse promulguée en 2010 constitue une avancée majeure pour protéger les journalistes. Toutefois, la loi organique portant sur le droit d’accès à l’information publique et instaurant le principe de transparence n’est toujours pas en vigueur malgré son adoption en novembre 2020. Des journalistes continuent de faire l’objet de convocations ou d’arrestations, bien que ces dernières soient relativement rares. En septembre 2022, la Haute Autorité de la communication (HAC) a suspendu cinq journalistes sans respecter les procédures légales.
Contexte économique
En Guinée, les médias de service public sont favorisés aux dépens des médias privés, l’État leur donnant la priorité dans l’accès aux événements officiels et pour effectuer les communications gouvernementales. Les subventions accordées aux médias privés sont jugées insuffisantes. En outre, la pandémie de Covid-19 a exacerbé les difficultés financières touchant le secteur de la presse.
Contexte socioculturel
Quelques sujets comme l’homosexualité la polygamie ou les violences conjugales sont traités avec une certaine prudence, voire de la retenue pour ne pas heurter la morale publique. Il arrive également que des journalistes abordant la question de la lutte contre les mutilations génitales féminines ou du mariage forcé soient ciblés par des groupes d’intérêt religieux.
Sécurité
Les journalistes sont régulièrement victimes d’agressions et de violences, particulièrement lors de manifestations politiques. Face à ces dangers, plusieurs ateliers portant sur la protection des journalistes ont été organisés par les syndicats de la profession et le Programme de développement des Nations unies (Pnud). Les professionnels des médias sont aussi fréquemment victimes de menaces de mort et de harcèlement sur les réseaux sociaux. Les auteurs de ces actes de violence, souvent des agents des forces de l’ordre, mais aussi des militants de partis politiques ou des activistes, restent dans l’immense majorité impunis.
EMDB