Terre des hommes ? Non, non, plutôt terre des diables ! Le fameux titre de Saint-Exupéry va mal, très mal au pays qui est le nôtre, un peu comme la guenille va à la belle au bois dormant. Le sanguinaire Sékou Touré n’a rien laissé d’humain à notre société, rendue, par les méfaits des dictatures (la sienne et celles, naturelles de ses successeurs), sourde, aveugle et muette à toute forme de civilisation. Nous venons de fêter les 64 ans de notre Indépendance avec le sens exagéré du folklore et de la démagogie, qui nous caractérise. Maintenant que les effets de la fête commencent à retomber, je vous invite, mes chers compatriotes, à nous regarder dans une glace et à évaluer point par point le bilan de celle-ci. Vous conviendrez avec moi que ce bilan est si maigre sur tous les plans que nous n’aurons besoin ni de statistiques ni même de balance ou de double-décimètre. Notre pays n’a rien d’autre à mesurer que des cadavres (par tonnages) et de l’hémoglobine (par hectolitres).
Ce n’est pas un hasard, si le Stade du 28 Septembre, symbole de notre « Non » unanime à de Gaulle a hébergé les célèbres massacres du même nom dont le procès a lieu en ce moment-même. Nous avons gagné notre Indépendance sous le sceau de la furie animale et de l’auto- destruction. Chez nous, tout est sanglant, même les noces !
Les Guinéens se réjouissent que ce procès ait lieu même 13 ans après les faits. Justice va être enfin rendue aux victimes. Bien sûr, cela ne ressuscitera pas nos morts. Bien sûr, cela n’effacera pas l’affront que nos honorables sœurs ont subi en public et en pleine journée. Mais cela nous donnera la fausse impression que nous sommes moins barbares que nous ne le sommes en réalité et surtout, cela nous permettra de porter le deuil de nos chers disparus.
Un véritable procès en Guinée ? Oui, quand les poules auront des dents !
Prenons donc notre mal en patience ! En Guinée, la barbarie qui est maintenant fort bien intégrée dans nos us et coutumes, a encore de beaux jours devant elle. Pour preuve, cette sordide histoire que raconte notre confrère, Africaguinée, celle de Aïssata D., violée par 3 militaires au Stade du 28 Septembre et immédiatement répudiée par son mari parce que justement elle a été violée. Depuis, Aïssata D. vit dans un container avec ses 4 enfants et lave le linge des voisins pour survivre. A ma connaissance, cela n’a choqué personne ni les citoyens ni les pouvoirs publics, ni les prêtres ni les marabouts. Normal, Aïssata D. a commis le crime considéré comme le plus abominable sous nos cieux : naître femme. Question : quand ce monstrueux époux va à l’église ou à la mosquée, qui invoque-t-il : Lucifer ou le bon dieu ?
Vous, vous rendez compte, mes chers compatriotes : violée par l’armée qui est payée pour la protéger contre les invasions barbares puis, répudiée par celui-là même qui a juré devant le maire de lui porter secours et assistance tout au long de la vie !
Cela se passe ainsi au pays de Sékou Touré : plus c’est diabolique, plus c’est guinéen.
Tierno Monénembo