Le FNDC a annoncé, à travers un communiqué, que la manifestation qu’il entendait organiser ce jeudi 23 juin 2022 est suspendue à la suite de l’intervention de sages et religieux. C’est une très bonne nouvelle car il faut toujours donner la chance au dialogue. Pour certains, le FNDC a tout simplement saisi l’occasion qui lui a été donnée de sauver la face parce qu’il n’avait aucune chance de mobiliser.
Mais il faut rappeler que personne ne pouvait imaginer, en 2019 et 2020, que le FNDC était capable d’amener des centaines de milliers de personnes à répondre à ses nombreux appels à manifester. La mobilisation était restée intacte même lorsque certains de ses leaders avaient été arrêtés et jetés en prison. Même la répression aveugle des manifestations n’avaient eu raison de la détermination des “défenseurs de la constitution”.
Il n’est pas certain que l’esprit FNDC ait disparu totalement au point de soutenir qu’il ne peut plus mobiliser des manifestants quel que soit leur nombre. Un pouvoir intelligent et avisé ne doit rien négliger et rien minimiser.
Par ailleurs, d’autres estiment que la suspension du mot d’ordre de manifestation du FNDC est due aux instructions du procureur général près la Cour d’appel de Conakry qui demande au procureurs de la République d’engager des poursuites contre les auteurs d’éventuelles infractions qui pourraient être commises à l’occasion de la manifestation projetée.
Mais il faut relever, d’une part, que le procureur général agit simplement dans le cadre de ses attributions. En effet, il est chargé entre autres de coordonner l’action des procureurs de la République de son ressort tant en ce qui concerne la prévention que la répression des infractions à la loi pénale ( Article 41 CPP). D’autre part, en tant que chef du parquet général et donc magistrat du parquet et défenseur de la société, il ne peut pas, en cas de poursuites judiciaires, juger ou condamner puisqu’il n’est pas juge. Le magistrat du parquet est tout simplement une partie dans un procès pénal, même si elle y est la partie principale. Il soumet des demandes au juge qui peut y faire droit ou les rejeter quitte à lui d’exercer les voies de recours ouvertes à une partie à un procès.
Le juge n’est donc pas obligé de suivre les réquisitions c’est-à-dire les demandes d’un procureur. D’ailleurs, l’actuel procureur général près la Cour d’appel de Conakry a prouvé à plusieurs occasions, quand il était un juge, que la volonté d’un procureur ne s’impose pas à un vrai juge.
Mais quelles que soient les considérations qui ont motivé la suspension de la manifestation du FNDC, celle-ci reste une décision sage. Elle contribue à la descripation et permet, au Premier ministre, l’occasion de prouver sa bonne foi, de mériter davantage la confiance des citoyens et de se construire une stature d’homme d’État capable de faire valoir ses positions face à des militaires qui tiennent les rênes du pays.
Me Mohamed Traoré, Ancien Bâtonnier