Je rappelle deux citations : 1. Le ver se trouve dans le fruit; 2. Le poisson pourrit toujours par la tête.
La grave tension entre la CEDEAO ( Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et la junte militaire du Mali, et peut-être un jour celle de la Guinée, est le résultat de maux profonds et bien connus qui empêchent tout développement durable du Continent Noir. Une longue période du commerce inhumain des Africains Noirs par l’Orient arabe et l’Occident, et une moins longue mais tout aussi traumatisante période de la colonisation ont brisé les reins des Africains et détruit les valeurs culturelles et historiques des pays d’Afrique Noire.
Ces périodes sombres ont préparé les Africains à vivre avec le mépris paternaliste des autres, la négation de leurs valeurs sociales et culturelles, le rejet de leur propre Histoire, le complexe naturel d’infériorité par rapport à l’étranger, l’assistanat et l’obéissance obséquieuse.
Aujourd’hui, chaque « Grande Puissance » du monde veut contrôler l’Afrique Subsaharienne et ses immenses richesses non encore exploitées. Seuls les dirigeants corrompus du sous-Continent semblent l’ignorer.
On comprend dès lors pourquoi, ces dirigeants du Continent Noir :
• Ne vivent leurs pouvoirs qu’en termes de domination sur leurs propres populations ;
• N’ont pas la conscience durable de l’intérêt de leurs peuples ;
• Ne s’accordent jamais durablement et efficacement sur une action/cause commune rédemptrice et refondatrice, étant assujettis pour la plupart à des intérêts extérieurs ;
• Trahissent leurs engagements de coopération en faveur des peuples au profit de leurs ambitions individuelles de s’enrichir et de rester à vie au pouvoir, encouragés en cela par une élite hypocrite, flatteuse, corrompue et corruptrice.
La perte quasi-totale de la crédibilité actuelle de la CEDEAO est essentiellement due à l’entêtement de deux chefs d’États qui ont trahi leurs serments en se livrant au tripatouillage éhonté de leurs constitutions respectives dans le seul but de se maintenir à vie au pouvoir pour servir des intérêts inavouables. Les élites africaines doivent arrêter de tresser des lauriers aux dirigeants assassins et corrompus pour la simple préservation de leurs petits privilèges mesquins et déshonorants.
L’affaiblissement politique de la CEDEAO ne doit cependant pas pousser les peuples des pays concernés à donner carte blanche aux régimes militaires pour des transitions sans fin. En effet, toute transition militaire qui dure longtemps se transforme en dictature. Je n’ai aucune qualité pour donner mon avis sur la conduite que doivent adopter les Maliens. Dans le cas de la Guinée, une durée de 18 à 24 mois me paraît encore acceptable et supportable par le peuple à condition que le CNRD évite les dérapages et conserve l’humilité qui lui a valu jusqu’à présent le plébiscite des populations en souffrance.
La meilleure illustration de la volonté du CNRD de ne pas s’éterniser au pouvoir est de mettre immédiatement le CNT (Conseil National de la Transition) en place, de faire élaborer et faire approuver rapidement une Constitution, de préparer et d’organiser des élections transparentes et crédibles sur la base d’un fichier électoral accepté par toutes les parties prenantes.
En démocratie, les peuples ont vocation à être dirigés par des personnes qu’ils ont librement choisies par un vote respectueux des droits individuels et collectifs.
Kémoko Touré