Dans l’histoire récente de la Guinée, la Justice a toujours été du côté des oppresseurs. Au lendemain des indépendances, chacun savait à quoi s’en tenir puisque politique et justice se confondaient. Le principe de la séparation des pouvoirs et l’indépendance des juges étaient quasiment inexistants. À la faveur du changement de régime en 1984, la Guinée a opté pour la démocratie, l’État de droit et les libertés individuelles, la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice.
Mais fort malheureusement, la justice n’a jamais su se montrer à la hauteur des attentes des citoyens. L’une des pages les plus sombres ces vingt dernières années sur le plan judiciaire reste incontestablement le procès Alpha Condé que tout monde, y compris l’intéressé, a qualifié de comédie judiciaire ou de parodie de justice. En 2013, les états généraux de la justice ont été organisés au Palais du Peuple à l’initiative du même Alpha Condé, devenu entre-temps président de la République.
Au lendemain de ces états généraux et surtout au regard des recommandations qui avaient été présentées au premier magistrat du pays, on pouvait espérer que la justice ferait sa mue. Mais, plus de sept ans après, la justice continue à être une déception pour bon nombre de citoyens, au point qu’on peut se demander aujourd’hui si elle est réformable. Elle est toujours minée par les mauvaises pratiques qui ont tendance à devenir une gangrène. Pourtant, les magistrats sont à l’heure actuelle les « agents de l’État » les mieux payés. Mais la justice n’arrive toujours pas satisfaire les justiciables. Pire, elle est devenue le deuxième pied de la dictature, l’autre étant les forces de défense et de sécurité. Même Alpha Condé ne semble pas être satisfait de la justice bien que la plupart de décisions de justice contre ses opposants sont destinées à lui faire plaisir.
Les magistrats ne devraient pourtant pas perdre que si Alpha Condé a eu des mots durs à l’endroit de la justice après sa condamnation et quand il est arrivé au pouvoir, un autre ferait la même chose un jour. Des magistrats ont contribué volontairement ou involontairement à tuer le rêve démocratique des Guinéens. Mais ils seront eux-mêmes jugés un jour par le Tribunal de l’Histoire.
SEKOU KOUNDOUNO responsable des stratégies et planification du FNDC